Knives & Scars

Chapter 3 : Un univers complexe

Il alluma son ordinateur.

Affaiblit, Shirotan s'était écroulé de fatigue la veille de son utilisation. Au démarrage, l'écran affichait un logo qui se chargeait et lorsque que la machine se lança, une fenêtre avec plusieurs onglets était ouverte. Une dont le Chat Anonymous Service (CAS) était ouvert, un site web dont le logo était un petit chat en ascii. Ce site permet de communiquer avec une clé spéciale de décryptage pour accéder à des chatrooms privées et intracables, souvent utilisés pour des demandes de services illégales ou juste des discussions à propos secrets.
Il a découvert ce site par une image qui l'a interpellé dans les quartiers bas, c'était un sticker sur un poteau défraichi dans la rue, un QR code.
En le scannant, il est tombé sur une page avec une plusieurs sites web différents.
Probablement, ce service doit être utilisé pour communiquer entre trafiquants de drogues et autres activités illégales. Dans tous les cas, c'est comme ça qu'il a pu entrer en contact avec Kuroge.
En fait, il se connaissaientt depuis bien avant. Lors de ses études en secondaire, dans une grande école publique réputée de classe moyenne, il se trouvait qu'ils étaient dans la même classe. Ils se parlaient peu, très peu, car en fait Shirotan ne parlait à personne.
Sa timidité l'a rendu très discret, sa voix ne portait pas, il était laissé dans son coin, la tête dans ses carnets, il était si effacé que même les profs l'oubliaient. Au fond de la classe, distrait et distant, se balançait sur sa chaise, Kuroge.
Le genre d'enfant à difficultés, qui enchaîne retards et retenues.
À première vue, il semblait incalculable, imprévisible. Nerveux. Si il ne l'était pas alors il était adossé contre le mur, il fumait clopes sur clopes en sautant le repas du midi à tapoter sur son téléphone.
Les études secondaires, c'était comme un genre d'endroit ou les enfants sont gardés et enfermés sous clés, surveillés jusqu'à ce qu'ils soient assez matures pour être capables de prendre leurs propres décisions de vie.
Le système scolaire à ses défauts que personne n'a jugé bon de modifier, d'adapter. Un fonctionnement élitiste par un système de points : les bons elles sont récompensés et les mauvais sont achevés.

Au fur et à mesure des années, Kuroge ne venait plus en cours.
Durant ces années d'études en art, Shirotan n'avait pas vraiment d'ami et si il arrivait à s'en faire, il finissait toujours par être abandonné dû à son attitude trop effacée. La distance entre lui et les autres se creusait de plus en plus, il ne suivait pas le rythme social et manquait les occasions de se faire apprécier. Dans sa solitude, il trouva du réconfort dans le monde d'internet et se découvrit une passion sombre pour les choses inappréciées, jugées étranges ou morbides.

En traînant sur internet lors de ses heures perdues, il regardait des images d'autopsies, d'opérations chirurgicales, de décapitations, d'accidents, de suicides ; les organes exposés à la lumière du jour.
Un hasard d'être tombé sur des bases de données d'images sombres et gores de si bonnes qualités que cela l'a fasciné.
Il a vu des choses atroces et s'endormit avec l'idée que ces choses pouvait lui arriver, jusqu'à avoir des insomnies écoeurantes à en avoir des hallucinations.

En prenant du recul, il a pu compatir avec la science. Le corps humain et son esprit est une machine complexe et sublime.
Une oeuvre en mouvement, un ensemble de connexions qui s'anime par un coeur. Par les mouvements d'un simple battement de coeur, cette action miraculeuse fait circuler le sang dans les veines, qui alimente les organes raccordés a un système qui apporte de l'énergie. De la chaleur. De la vitalité.

En découvrant le côté sombre d'internet, la pornographie faisait son effet aussi à cet âge-là. À vrai dire, il a découvert assez tardivement le fait de comprendre le plaisir.
Comme il n'avait jamais eu de partenaire ni d'attache émotionnelle forte, il concentrait son énergie dans d'autres choses.
Dans un univers interne secret :
Un énorme univers complexes de fantasmes, de passions. De problèmes irrésolus.

Sans nouvelles



Dans la vie réelle, il s'agit de faire le pas vers ce monde. Lorsqu'on vit à l'écart du désir de se faire aimer, on ne connait pas l'amour. Ni charnel, ni réciproque. On n'est pas influencé par les autres, et on est libre de nos mouvements. Maître de nos propres pensées. On jouit de notre nature interne la plus profonde.
Mais notre solitude nous bouffe les entrailles. Elle nous donne faim.
Et un animal affamé doit manger.

Il quitta son ordinateur pour aller faire chauffer de l'eau.

***

La cuisine était vide, absence de condiments, de vaisselle, de déchets. Tout semblait rangé, ordonné dans une logique pratique.
Seule la bouilloire était pleine de calcaire, l'entretien des canalisations n'était pas vraiment effectués ici.
Un goutte, qui tombait à un rythme régulier dans l'évier ; ce bruit répétitif animait solennellement la pièce humide.
Le temps que l'eau atteigne un degré d'ébullition, il prit un sachet de nouilles instantanées d'une étagère et le posa près d'un bol.
Son alimentation se constituait principalement de nouilles instantanées à l'eau, de bouillon de miso ou de udon avec un oeuf, et parfois des légumes.
Sa petite cuisine, à quelques mètres de la salle de bain, il s'y déplaça et observa ses oreilles étincelantes dans le miroir. La plaie avait saigné durant la nuit.
En prenant un coton stérile, il l'enduit d'alcool et le pressa contre la boucle. Légèrement saisi par le contact de l'alcool sur la chair meurtrie, il prit soin d'enlever le sang et appliqua une crème cicatrisante. Il fit de même pour l'autre côté.
C'était surprenant de voir la différence qu'un simple piercing faisait toute une différence sur un visage. C'était brillant, discret mais voyant quand même.

***

Écran de solitude.
Pas de messages.
Eau qui coulait à flot dans la machine à laver. Se sentir emporter par les vagues. Le doux courant. Se sentir flotter, sans se débattre. Sans penser à ce qu'il y a sous nos pieds, le visage tourné vers le ciel. Une étendue bleue, infinie. Les nuages sont doux, purs, légers.

Cela faisait plus d'une semaine qu'il n'avait pas de nouvelles de Kuroge.
Son humeur s'était assombrie, et il n'était pas sorti depuis le jour où il est allé au salon de Mika, ayant attrapé un mauvais rhume à cause du froid. Il sentait que les cours qu'il manquait allaient être durs à rattraper, que cet écart entre le rythme scolaire et sa santé était comme un choix qu'il devait faire. Décider de se crever pour rester dans le système ou laisser tomber et crever quand même ?
Le choix était vite fait. Mais la culpabilité était immense.
Il y a... Toujours une solution.
C'est ce qu'il se disait pour tenter de se convaincre au mieux, alors que sa toux s'empirait.
De sa petite taille et son corps faible n'a jamais été ce qui le rendait fort. Depuis très jeune déjà, à chaque fois qu'il tombait malade, c'était toujours plus longtemps que les autres garçons de son âge. Il semblait plus pâle et plus fragile que les autres. N'ayant aucun lien avec ses parents biologiques, il n'était pas possible de savoir si c'était héréditaire ou pas.
La malchance d'être né dans un corps faible a influencé sa façon d'être, son rapport au monde. Bien que trop souvent, il pensait qu'il allait crever avant tout le monde, mais que personne ne s'en soucierait réellement. Une famille absente, des amis inexistants, aucunes preuves ni testament, il s'en irait sans causer de troubles ni de peine à quiconque. Son existence lui importait peu.
Par ses pensées sombres et l'heure tardive, sa gorge lui brûlait et il fut pris d'une crise de toux incessante. Si importante qu'il se souciait de déranger ses voisins et étouffa ses sanglots dans son oreiller.

*

[Chapter 3 : Un univers complexe]

Il alluma son ordinateur.

Affaiblit, Shirotan s'était écroulé de fatigue la veille de son utilisation. Au démarrage, l'écran affichait un logo qui se chargeait et lorsque que la machine se lança, une fenêtre avec plusieurs onglets était ouverte. Une dont le Chat Anonymous Service (CAS) était ouvert, un site web dont le logo était un petit chat en ascii. Ce site permet de communiquer avec une clé spéciale de décryptage pour accéder à des chatrooms privées et intracables, souvent utilisés pour des demandes de services illégales ou juste des discussions à propos secrets.
Il a découvert ce site par une image qui l'a interpellé dans les quartiers bas, c'était un sticker sur un poteau défraichi dans la rue, un QR code.
En le scannant, il est tombé sur une page avec une plusieurs sites web différents.
Probablement, ce service doit être utilisé pour communiquer entre trafiquants de drogues et autres activités illégales. Dans tous les cas, c'est comme ça qu'il a pu entrer en contact avec Kuroge.
En fait, il se connaissaientt depuis bien avant. Lors de ses études en secondaire, dans une grande école publique réputée de classe moyenne, il se trouvait qu'ils étaient dans la même classe. Ils se parlaient peu, très peu, car en fait Shirotan ne parlait à personne.
Sa timidité l'a rendu très discret, sa voix ne portait pas, il était laissé dans son coin, la tête dans ses carnets, il était si effacé que même les profs l'oubliaient. Au fond de la classe, distrait et distant, se balançait sur sa chaise, Kuroge.
Le genre d'enfant à difficultés, qui enchaîne retards et retenues.
À première vue, il semblait incalculable, imprévisible. Nerveux. Si il ne l'était pas alors il était adossé contre le mur, il fumait clopes sur clopes en sautant le repas du midi à tapoter sur son téléphone.
Les études secondaires, c'était comme un genre d'endroit ou les enfants sont gardés et enfermés sous clés, surveillés jusqu'à ce qu'ils soient assez matures pour être capables de prendre leurs propres décisions de vie.
Le système scolaire à ses défauts que personne n'a jugé bon de modifier, d'adapter. Un fonctionnement élitiste par un système de points : les bons elles sont récompensés et les mauvais sont achevés.

Au fur et à mesure des années, Kuroge ne venait plus en cours.
Durant ces années d'études en art, Shirotan n'avait pas vraiment d'ami et si il arrivait à s'en faire, il finissait toujours par être abandonné dû à son attiture trop effacée. La distance entre lui et les autres se creusait de plus en plus, il ne suivait pas le rythme social et manquait les occasions de se faire apprécier. Dans sa solitude, il trouva du réconfort dans le monde d'internet et se découvrit une passion sombre pour les choses inappréciées, jugées étranges ou morbides.

En traînant sur internet lors de ses heures perdues, il regardait des images d'autopsies, d'opérations chirurgicales, de décapitations, d'accidents, de suicides ; les organes exposés à la lumière du jour.
Un hasard d'être tombé sur des bases de données d'images sombres et gores de si bonnes qualités que cela l'a fasciné.
Il a vu des choses atroces et s'endormit avec l'idée que ces choses pouvait lui arriver, jusqu'à avoir des insomnies écoeurantes à en avoir des hallucinations.

En prenant du recul, il a pu compatir avec la science. Le corps humain et son esprit est une machine complexe et sublime.
Une oeuvre en mouvement, un ensemble de connexions qui s'anime par un coeur. Par les mouvements d'un simple battement de coeur, cette action miraculeuse fait circuler le sang dans les veines, qui alimente les organes raccordés a un système qui apporte de l'énergie. De la chaleur. De la vitalité.

En découvrant le côté sombre d'internet, la pornographie faisait son effet aussi à cet âge-là. À vrai dire, il a découvert assez tardivement le fait de comprendre le plaisir.
Comme il n'avait jamais eu de partenaire ni d'attache émotionnelle forte, il concentrait son énergie dans d'autres choses.
Dans un univers interne secret :
Un énorme univers complexes de fantasmes, de passions. De problèmes irrésolus.

[Nouvelles]

Dans la vie réelle, il s'agit de faire le pas vers ce monde. Lorsqu'on vit à l'écart du désir de se faire aimer, on ne connait pas l'amour. Ni charnel, ni réciproque. On n'est pas influencé par les autres, et on est libre de nos mouvements. Maître de nos propres pensées. On jouit de notre nature interne la plus profonde.
Mais notre solitude nous bouffe les entrailles. Elle nous donne faim.
Et un animal affamé doit manger.

Il quitta son ordinateur pour aller faire chauffer de l'eau.

***

La cuisine était vide, absence de condiments, de vaisselle, de déchets. Tout semblait rangé, ordonné dans une logique pratique.
Seule la bouilloire était pleine de calcaire, l'entretien des canalisations n'était pas vraiment effectués ici.
Un goutte, qui tombait à un rythme régulier dans l'évier ; ce bruit répétitif animait solennellement la pièce humide.
Le temps que l'eau atteigne un degré d'ébullition, il prit un sachet de nouilles instantanées d'une étagère et le posa près d'un bol.
Son alimentation se constituait principalement de nouilles instantanées à l'eau, de bouillon de miso ou de udon avec un oeuf, et parfois des légumes.
De sa petite cuisine, à quelques mètres de la salle de bain, il s'y déplaça et observa ses oreilles étincelantes dans le miroir. La plaie avait saigné durant la nuit.
En prenant un coton stérile, il l'enduit d'alcool et le pressa contre la boucle. Légèrement saisi par le contact de l'alcool sur la chair meurtrie, il prit soin d'enlever le sang et appliqua une crème cicatrisante. Il fit de même pour l'autre côté.
C'était surprenant de voir la différence qu'un simple piercing faisait toute une différence sur un visage. C'était brillant, discret mais voyant quand même.

***

De retour à son écran d'ordinateur,
Écran de solitude.

Eau qui coulait à flot dans la machine à laver. Se sentir emporter par les vagues. Le doux courant. Se sentir flotter, sans se débattre. Sans penser à ce qu'il y a sous nos pieds, le visage tourné vers le ciel. Une étendue bleue, infinie. Les nuages sont doux, purs, légers.

Cela faisait plus d'une semaine qu'il n'avait pas de nouvelles de Kuroge.
Son humeur s'était assombrie, et il n'était pas sorti depuis le jour où il est allé au salon de Mika, ayant attrapé un mauvais rhume à cause du froid. Il sentait que les cours qu'il manquait allaient être durs à rattraper, que cet écart entre le rythme scolaire et sa santé était comme un choix qu'il devait faire. Décider de se crever pour rester dans le système ou laisser tomber et crever quand même ?
Le choix était vite fait. Mais la culpabilité était immense.

Il y a... Toujours une solution.

C'est ce qu'il se disait pour tenter de se convaincre au mieux, alors que sa toux s'empirait.
Son corps faible et sa petite taille n'a jamais été ce qui le rendait fort. Depuis très jeune déjà, à chaque fois qu'il tombait malade, c'était toujours plus longtemps que les autres garçons de son âge. Il semblait plus pâle et plus fragile que les autres. N'ayant aucun lien avec ses parents biologiques, il n'était pas possible de savoir si c'était héréditaire ou pas.
La malchance d'être né dans un corps faible a influencé sa façon d'être, son rapport au monde. Bien que trop souvent, il pensait qu'il allait crever avant tout le monde, mais que personne ne s'en soucierait réellement. Une famille absente, des amis inexistants, aucunes preuves ni testament, il s'en irait sans causer de troubles ni de peine à quiconque. Son existence lui importait peu.
Par ses pensées sombres et l'heure tardive, sa gorge lui brûlait et il fut pris d'une crise de toux incessante. Si importante qu'il se souciait de déranger ses voisins et étouffa ses sanglots dans son oreiller.

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